Au printemps, la STIB présentait son projet de « démantèlement partiel » du Palais du Midi, présenté comme la seule solution à la poursuite du chantier du Métro 3. Ce qui constitue en réalité une démolition quasi intégrale du bâtiment plongera les quartiers Stalingrad et Lemonnier dans le bruit et la poussière pour 9 années supplémentaires, et ce juste pour le gros œuvre. Un enfant de Stalingrad né au début du chantier aura donc 15 ans quand la carcasse du nouveau bâtiment sera construite, à supposer que les délais annoncés soient pour une fois respectés. Ce projet destructeur vient de recevoir son permis d’urbanisme, et ce malgré les incertitudes techniques et financières qui pèsent sur la réalisation de la ligne 3.
Dans son avis relatif à la démolition-reconstruction du Palais du Midi publié en mars dernier, IEB pointait le caractère tout à fait trompeur des visuels et images saupoudrés dans les documents produits par la STIB et les bureaux d’étude, qui préfiguraient un parachèvement nullement visé par la demande de permis. Cette tromperie, largement appuyée par une presse ignorante et paresseuse [1], est d’autant plus problématique que « l’étude sur la reprogrammation et la transformation spatiale du Palais du Midi » et son inévitable « démarche participative » commanditées par la Ville de Bruxelles, n’ont pas encore commencé. Ce n’est rien d’autre qu’un chat dans un sac que la commune et la STIB tentent de nous vendre, comme le suggère par ailleurs l’avis négatif et très critique du BMA sur le projet : « Le BMA ne peut en aucun cas considérer ce projet comme une proposition crédible pour la reconstruction du Palais du Midi », notamment au vu « des informations insuffisantes sur les intentions architecturales et la matérialisation du projet dans la demande de permis déposée. Le BMA a l’impression qu’il ne s’agit là que d’une proposition de projet pro forma » [2].
La délivrance du permis autorisant la démolition-reconstruction intervient moins de deux mois après la publication d’un rapport de la STIB qui déplie plusieurs scénarios relatifs au Métro 3, dans lequel l’opérateur propose de terminer la première phase du projet (le tronçon Albert – Gare du Nord) tout en gelant, pour une durée évaluée à dix ans, la poursuite de la seconde (le tronçon Gare du Nord – Bordet). Une proposition tout à fait cohérente avec la logique du fait accompli qui teinte ce dossier depuis ses origines : la phase 2 appelée à être suspendue n’est-elle pas nécessaire à l’exploitation optimale de la ligne de Métro 3 ? [3] Quoi qu’il en soit, la STIB propose rien de moins qu’une dégradation prolongée de l’accessibilité du centre-ville et des conditions de déplacement des usagers en raison des correspondances que sa proposition entraîneraient (voir schéma ci-dessous).
Quant à la Ville de Bruxelles, non contente de sacrifier plusieurs quartiers sur l’autel du Métro 3 et d’avoir évincé du Palais du Midi une Haute École et plusieurs dizaines de clubs sportifs, elle n’a pas hésité à titrer sa dernière gazette avec la mention suivante : « C’est la rentrée ! Pour les étudiants et… les sportifs ». Dans le dossier du Métro 3, comme pour ses coûts et ses délais, l’indécence ne semble pas connaître de limite.
[1] « Voici à quoi ressemblera le futur Palais du Midi » titrait la Dernière Heure au début de l’enquête publique, sans hésiter à reprendre sans les contextualiser les visuels trompeurs de la note explicative du projet de démolition.
[3] « Exploiter le métro que sur le tronçon Albert-Nord n’est pas tenable sur le long terme » indiquait le CEO de la STIB en mai 2023.