Ce mardi 23 septembre à 14h00 se tiendra, à l’Hôtel communal de Molenbeek, la commission de concertation sur le projet de construction de 5 bâtiments sur la friche de la Porte de Ninove. Les comités d’habitant.es et les associations urbaines s’opposent à ce projet, pur produit de la spéculation immobilière, dont ni la densité ni le programme ne répondent aux besoins identifiés tant dans le quartier qu’en Région bruxelloise.
La friche triangulaire située au nord de la Porte de Ninove (entre le canal, le boulevard de l’Abattoir et la chaussée de Ninove) constitue depuis plus de 20 ans un chancre qui dégrade la qualité de vie des riverains et usagers du quartier. Cette situation est un produit direct de la spéculation immobilière qui a lieu depuis des décennies sur ce site.
Un plan d’aménagement directeur régional (PAD) devait permettre à la société Nautea, propriétaire du terrain, de s’affranchir des règles urbanistiques générales qui n’autorisent pas de construire des tours sur ce terrain. Toutefois, ce PAD n’a pas été adopté en dernière lecture par le gouvernement. Cela n’a pas empêché Nautea d’introduire une demande de permis pour la construction de 5 bâtiments allant de 6 à 14 étages, soit 21.000 m² de planchers pour 4.000 m² de terrain, comprenant 2.028 m² d’équipements d’intérêt collectif, 133 logements, 105 logements étudiants, 527 m² de commerce et 2 niveaux en sous-sol abritant des parkings pour 89 véhicules et 556 vélos ainsi que 92 caves.
Selon l’administration perspective.brussels, le projet s’inscrit à la jonction de 3 quartiers où la densité de population est largement supérieure à la moyenne régionale (7.527 habitants/km2) : Molenbeek historique (23.864 hab/km2), Dansaert (16.892 hab/km2), Cureghem Rosée (9.586 hab/ km²). Les projets et réalisations récentes d’ensembles résidentiels dans les environs du site sont déjà nombreux.
Les habitant.es ont avant tout besoin de davantage d’espaces verts, de détente et de respiration. Le nouveau parc de la Porte de Ninove constitue le seul espace ouvert végétalisé à proximité et fait déjà l’objet d’une surfréquentation qui empêche aux plantes de bien se développer.
L’argument de la croissance démographique est insuffisant pour justifier la construction de logement à la Porte de Ninove. Selon les dernières projections de l’IBSA, la Région peut s’attendre à une diminution importante de la croissance démographique comparée aux décennies précédentes, et même à une stagnation de la population à plus long terme. La véritable croissance qu’on observe à Bruxelles est celle d’une demande pour l’accessibilité à un logement abordable et digne. Or les logements privés qui sont prévus dans le projet de Nautea, et vendus comme produits d’investissement, seront hors de portée de la bourse de la grande majorité des ménages bruxellois.
Si le projet annonce la création de 41 logements sociaux, la SLRB, par la voix de Nawal Ben Hamou, secrétaire d’État au logement, a déjà annoncé qu’elle n’avait aucune intention d’acquérir ces logements en raison d’un manque de budget.
Quant à la création de logements pour étudiants à cet endroit, elle ne répond à aucune demande étayée sinon la volonté du promoteur d’investir dans un segment porteur du marché qu’il décrit sur son site en ces termes : « avec des rendements bien supérieurs à ceux des comptes d’épargne, l’investissement dans les chambres d’étudiants est donc une décision sage et raisonnable. Grâce à des prix d’entrée accessibles combinés à des loyers intéressants pour une surface habitable assez réduite, les investisseurs ont la garantie d’obtenir un rendement conséquent. Aussi, ce type de bien reste un atout précieux dans votre portefeuille d’investissement [1] ».
Les niveaux de bruit et de pollution atmosphérique en bordure du boulevard de l’Abattoir et de la chaussée de Ninove sont très élevés. Contraindre des personnes à habiter dans une zone si exposée aux pollutions est contraire à l’article 23 de la Constitution belge.
Les hauteurs du projet (une muraille de bâtiments de respectivement 50,4m, 24,6m, 39,9m, 27,9m et 46,5m de hauteur) sont en rupture totale avec le tissu urbain environnant, créant une coupure supplémentaire entre les 3 communes. Cela va à l’encontre du besoin de (re)créer un lien entre ces quartiers et demande des dérogations injustifiables au règlement régional urbanistique en vigueur qui n’autorise qu’un maximum de 16,5 mètres de hauteur.
Même si en surface, des espaces publics sont projetés, le parking souterrain prévu entraînerait la bétonnisation totale de la parcelle et les bâtiments élevés généreraient une très forte minéralisation (soit un taux d’imperméabilisation de 99%). Cela va à l’encontre de l’adaptation au changement climatique, de la lutte contre les îlots de chaleur urbains et de la préservation de la biodiversité que la Région entend défendre et qui sont d’autant plus cruciaux dans les quartiers denses et populaires du centre-ville.
Les habitant.e.s des communes de Molenbeek, Bruxelles et Anderlecht n’ont pas besoin d’un énième projet spéculatif le long du canal. Nous demandons à la commune de Molenbeek et à la Région bruxelloise de rendre un avis négatif à cette demande de permis, et de le refuser. En effet, il incombe aux pouvoirs publics de prendre leur responsabilité soit en imposant au promoteur un cadre clair et justifié par l’intérêt collectif, soit en prenant eux-mêmes en main l’avenir de ce site et d’élaborer un projet combinant des aménagements paysagers qualitatifs, la construction de logement public et social, la création d’équipements collectifs (culturels, sociaux, médicaux...) et d’activités productives pourvoyeuses d’emploi local, le tout dans le respect de la réglementation urbanistique en vigueur.
IEB