La lutte des travailleurs des Forges de Clabecq contre la fermeture de leur usine en 1997 est tout à fait exceptionnelle et n’est pas close. 27 ans après la faillite, ils continuent à se battre pour récupérer la part de leurs salaires prêtés à l’entreprise sous la contrainte. Une solidarité s’organise, mêlant anciens travailleurs, militants politiques et mouvements de résistance des terres et de la récupération de la dette.
L’histoire des Forges de Clabecq, de 1972 à 1997, c’est l’histoire d’hommes qui ont tenté de dompter une réalité impitoyable et d’établir un quasi-pouvoir ouvrier au sein de l’usine. Une histoire dont le fil conducteur est l’évolution de la pensée des travailleurs, privilégiant les acquis culturels plutôt que les acquis économiques, la découverte et la mise en valeur des capacités de chacun, la remise en cause des autorités hiérarchiques et l’éradication systématique des pratiques discriminatoires et racistes.
L’extraordinaire de cette épopée se révèle dans les dizaines d’années de construction d’un syndicalisme de base, révolutionnaire, unique dans l’histoire sociale belge de l’après-guerre. Le récit de Silvio Marra, délégué syndical aux Forges et militant communiste, recueilli dans le livre Moi, Silvio de Clabecq, militant ouvrier [1], témoigne de cette aventure collective et humaine d’une inventivité, d’une volonté d’émancipation et d’une démocratie ouvrière tout à fait singulières et jubilatoires.
Pour Silvio et ses camarades, le quotidien à l’usine, c’est d’abord s’atteler à déconstruire certaines règles qui règnent dans l’entreprise. Notamment les attitudes de résignation et de peur. Rapidement élu délégué syndical en charge des questions d’hygiène et de sécurité, Silvio témoigne des luttes qui ont eu lieu pendant trente ans pour améliorer les conditions de travail et pour empêcher la fermeture annoncée du site. Les ouvriers de Clabecq se fient à leurs propres forces et à la connaissance de leur métier pour mener leurs combats. Quitte à mettre de côté l’appareil syndical sitôt qu’il a tenté de leur mettre des bâtons dans les roues ou déclaré ne plus rien pouvoir pour eux.
Dans la forge, l’émancipation doit être une œuvre collective. Son poste syndical, Silvio le voit comme un moyen de faire vivre l’« esprit de Clabecq ». Dans une entreprise, qui peut être le catalyseur du combat à mener pour la prévention des accidents, la protection de la santé et de la nature, contre les discriminations, le racisme et la fermeture ? Les militants syndicaux qui ont une conscience et une formation politiques. Ceux qui rêvent d’un monde meilleur et veulent œuvrer à une autre société. Sans cette vision, le destin des travailleurs est soumis aux aléas des pressions patronales, de l’appareil syndical, des partis politiques, de la presse et de l’idéologie dominante.
À l’arrivée de Silvio aux Forges, 20 % du personnel étaient blessés chaque année, qu’ils soient estropiés, paralysés, amputés d’un doigt ou victimes d’un accident suffisamment grave pour être renvoyés à la maison. La sidérurgie concentre en effet tous les risques : le froid, le chaud, les chutes, l’écrasement, l’incendie, l’explosion, l’intoxication aux gaz, l’électrocution, l’utilisation de produits toxiques, la noyade dans les bassins d’eau qui recueillent les pailles du laminoir et même l’exposition aux rayonnements radioactifs.
Prévenir les accidents et préserver la santé des travailleurs, c’est obliger le patron à faire des investissements, mais c’est aussi élaborer une politique de prévention active et efficace grâce à une forte action syndicale et à une participation importante du personnel. Les militants des Forges ont mené le combat pendant dix ans pour retirer l’amiante de l’usine, endroit par endroit, et trouver des matières de remplacement. Résultat, les Forges n’achetaient plus que cent vingt-cinq kilos d’amiante par an en 1987, contre vingt-sept tonnes en 1972.
L’usine renfermait plus de sept cents produits toxiques : des métaux lourds comme le mercure, des solvants, des peintures… L’intoxication des ouvriers était chose courante. Aucune politique d’achat des produits n’existait et aucune réglementation n’était appliquée que ce soit pour les utiliser, les trier ou les éliminer. Des dizaines de boîtes ouvertes et vides polluaient la terre et l’air. Une partie de ces déchets toxiques, les graisses et les huiles, était évacuée dans la Sennette, la rivière qui traverse les Forges. Des poissons y nageaient avant qu’elle parcoure l’usine, mais plus après ! Les Forges empoisonnaient l’eau. En la matière également, les travailleurs ont imposé une politique d’achat sous le contrôle du service médical de l’usine, un règlement d’utilisation des produits, une politique de protection des travailleurs par des masques, des gants, des filtres au-dessus des machines… Ils ont obtenu une politique de tri et de stockage des déchets, afin qu’ils ne soient plus déversés dans la rivière. Après cinq ans, grenouilles et poissons nageaient à nouveau dans la Sennette, à la sortie de l’usine.
Dans la forge, l’émancipation doit être une œuvre collective.
Il existait à Clabecq, comme ailleurs, une conception qu’ils ont combattue pied à pied : celle de « la délégation qui va faire ». Ce concept est tout à fait erroné, car un délégué ne peut rien obtenir sans mobiliser les travailleurs pour agir ensemble. La politique syndicale menée reflète exactement la position de classe défendue. La droite syndicale veut imposer aux travailleurs un deuxième pouvoir après celui du patron : celui du syndicat. La position de la gauche syndicale, au contraire, encourage les travailleurs à prendre eux-mêmes les responsabilités et à les assumer. Pour cela, la participation de tous et l’unité des travailleurs sont nécessaires.
Un axe essentiel a donc été celui de combattre le racisme : tous les travailleurs devaient être traités de la même façon. Si l’un d’entre eux passait avant les autres parce qu’il sortait de l’école industrielle et a un diplôme, c’était une discrimination qui se faisait sur le dos des immigrés. Pour les anciens et les immigrés, la perspective d’accéder à des postes de brigadier, de contremaître ou de chef de secteur était inimaginable. Le patron proposait, décidait et eux n’avaient même pas le droit de postuler ! Les meilleures places étaient attribuées directement aux ouvriers les plus dociles afin de garder une certaine mainmise sur l’ensemble du personnel.
La délégation syndicale a ouvert de nouvelles perspectives en partant de l’idée que la pratique est une école, une autre école, mais une école tout de même. La délégation a réussi à insuffler une idéologie ouvrière de justice sociale. Si l’injustice est supprimée en traitant tous les ouvriers de la même façon et en leur accordant les mêmes droits, le racisme n’a plus de terrain propice où se développer. C’est ainsi que des ouvriers illettrés ont pu accéder à des postes de responsabilité, avec l’aide de leurs camarades pour lire et rédiger les rapports.
La délégation des Forges a créé un comité d’usine parallèle qui rassemblait entre trente et cinquante militants actifs et de gauche. Il se réunissait une fois par mois, en dehors de l’usine, ou chaque fois que la situation l’exigeait. La seule condition pour y participer était l’assiduité. Le comité d’usine était un lieu de débat et de formation politique qui a beaucoup aidé à élever le niveau de conscience des travailleurs aux Forges, il a été jusqu’à rassembler plus de 100 militants. Toute réunion commençait par une formation. Il s’agissait de faire comprendre les clés de la société capitaliste et de faire apparaître cette profonde injustice : ce sont les travailleurs qui produisent la richesse dont s’accaparent le patronat et les actionnaires. Chaque conflit, petit ou grand, était relié à sa cause, à sa nature. Pour briser une vision selon laquelle les syndicats ne s’occuperaient que du salaire et non du fonctionnement de l’entreprise, les militants ont parlé d’investissements et appris aux travailleurs à lire un bilan d’entreprise.
On a expliqué que le capitalisme vole la force de travail des ouvriers, qu’une entreprise productive peut perdre de l’argent car les actionnaires courent après les dividendes ; on a démontré que la crise qui frappait le secteur de l’acier n’était en rien liée à leur qualité de travail, ou au fait qu’ils coûteraient trop cher ; on a montré que la surproduction d’acier était tout à fait relative (des enfants travaillaient dans les mines à mains nues, tandis que des millions de paysans pauvres travaillaient la terre sans outils).
Cette force, construite pendant vingt-cinq ans, s’est exprimée comme une puissance de solidarité énorme et très difficile à désorganiser.
Le comité d’usine prenait aussi en charge les visiteurs : deux ou trois fois par mois, des groupes de quarante à cinquante personnes visitaient l’entreprise de huit heures à midi, accompagnés par des militants et quelques ingénieurs pour les explications techniques. Plusieurs milliers de personnes ont ainsi visité l’usine. Ces activités s’inscrivaient dans une stratégie contre possible future fermeture : tisser des liens avec des syndicalistes, des étudiants ou des associations était crucial dans un tel contexte.
Les intérêts des travailleurs de Clabecq n’étaient pas différents de ceux de tous les travailleurs de Belgique et du monde. C’est ainsi qu’ils prenaient leur part de responsabilités dans la lutte syndicale du monde du travail, le plus largement possible. Ils étaient présents et intervenaient chaque fois qu’un conflit social émergeait en Belgique. Lors d’une grève à l’usine de Volkswagen, à Caterpillar, quand la direction menaçait les délégués de licenciement et les empêchait de mener à bien leur travail syndical… Ils participaient aussi en nombre aux manifestations, qu’elles soient organisées par les syndicats ou des mouvements antifascistes et antiracistes, contre la guerre, etc.
C’est dans cette longue marche que se sont forgées une confiance, une fraternité et une amitié entre ceux qui participaient à ces mouvements. En est issue une force sociale et politique qui a pu affronter la faillite. Cette force, construite pendant vingt-cinq ans, s’est exprimée comme une puissance de solidarité énorme et très difficile à désorganiser. Quand la faillite des Forges a été déclarée en janvier 1997, les travailleurs ont appelé à une manifestation dans l’usine, précédée d’une marche multicolore contre l’exclusion. 70 000 personnes ont marché ! Et les Forges de Clabecq n’ont pas été fermées !
Mais aujourd’hui, 27 ans après la faillite des Forges de Clabecq, la lutte n’est pas finie. Les travailleurs des Forges veulent et doivent récupérer la part de leurs salaires prêtés à l’entreprise sous la contrainte entre 1994 et 1997, pour – prétendument – éviter la faillite, soit 20 millions d’euros. Une solidarité s’organise, mêlant anciens travailleurs de Clabecq, militants politiques et mouvements de résistance issus d’une nouvelle génération anticapitaliste et anti-impérialiste, comme le réseau ADES, Classe contre classe, le Front d’action révolutionnaire, Occupons le terrain, les Soulèvements de la terre Bruxelles et l’IWW Bruxelles.
Les intérêts des travailleurs de Clabecq n’étaient pas différents de ceux de tous les travailleurs de Belgique et du monde.
Aujourd’hui, deux créanciers s’affrontent pour récupérer 20 millions d’euros : l’État belge, incarné par le ministre des Finances Vincent Van Peterghem, et les anciens salariés des Forges. Pourquoi les 20 millions d’euros doivent-ils revenir aux travailleurs ?
Suite à la vague de récession qui a frappé l’entreprise à partir de 1990-1991, les dirigeants ont commencé par supprimer 300 emplois via des pré-pensions et des départs volontaires (début 1992). Après quoi, le patronat des Forges a imposé unilatéralement une diminution de 10 % du salaire des travailleurs et la suppression du treizième mois. Naturellement, il s’est heurté à la levée de boucliers des délégations syndicales qui, après les mouvements sociaux, ont imposé un rapport de force leur permettant de négocier les choses suivantes : les 1810 ouvriers, les 300 employés, et les 100 cadres consentaient à participer à l’effort général pour tenter de sauver les Forges mais sous forme de prêt à l’entreprise ; les 10% de diminution de leur salaire et la suppression du treizième mois se transformaient en prêt à l’entreprise, censé permettre aux Forges d’économiser 695 millions de francs belges sur neuf mois, soit un peu plus de 17 millions d’euros. Autrement dit, les salariés acceptaient d’« avancer » des heures de travail gratuitement dans le cadre du plan de relance des Forges, heures de travail que la direction s’engageait à rembourser dès que la situation le permettra et au plus tard en juillet 1995. La situation va continuer à se dégrader, le prêt ne sera pas remboursé en 1995, ni au moment de la faillite, en 1997. Ces salaires impayés pendant plus de 3 ans représentent 20 millions d’euros sans les intérêts. Aujourd’hui, la faillite des Forges n’est toujours pas clôturée et la curatelle va récupérer la valeur du terrain de Vilvoorde dans les mois à venir.
La créance de l’État belge envers les Forges ne peut s’expliquer sans que ne soit reconnu le rôle majeur joué par la Commission européenne. La situation en 1992 est assez particulière. En principe, la concurrence au sein de l’Union Européenne (UE) est régulée par une Commission qui proscrit toute aide publique à l’industrie sidérurgique. Le but est simple, prévenir la concurrence « déloyale » que représenteraient des entreprises aidées par des États face à d’autres qui ne le seraient pas. Seulement, la crise du milieu des années 70 frappe si durement l’industrie sidérurgique, que la Commission assouplit l’interdiction du recours aux aides d’État afin que les entreprises puissent être accompagnées dans la restructuration nécessaire du secteur dans son ensemble. La Commission élabore en 1980 un code des aides publiques visant à encadrer cet assouplissement. Après avoir autorisé une dernière salve d’aides publiques, la Commission décide cependant de revenir à l’interdiction totale en 1993. Or, en 1993, le dossier des Forges est toujours en examen. Devant l’ampleur des besoins des Forges pour se remettre en selle, la Commission détient presque l’équivalent d’un pouvoir de véto sur le sauvetage ou non de l’entreprise. Et cela n’a pas raté. Sous les pressions du gouvernement britannique, d’Eurofer et d’entreprises allemandes et françaises, la Commission a finalement déclaré ces aides illégales et a condamné les Forges – c’est-à-dire l’État qui s’était porté garant de ces prêts auprès des banques – à rembourser les montants perçus.
Cette dette créée directement pour protéger le libre marché européen est un élément central dans les revendications de celles et ceux de Clabecq aujourd’hui. En effet, la conséquence directe de cette dette positionne l’État et les anciens travailleurs de Clabecq tous deux en créanciers des Forges. Cette « concurrence » se cristallise autour de la vente d’un terrain situé à Vilvoorde et appartenant aux Forges dont la valeur en l’état correspond au montant dû, soit pour l’État soit pour les travailleurs, mais pas suffisamment pour les deux. Les revendications des anciens travailleurs sont claires : ils demandent à l’État de ne pas se présenter comme créancier prioritaire, créance qu’il ne doit qu’à la politique libérale européenne, face aux anciens travailleurs qui eux, se sont fait voler leurs salaires.
Ces salaires impayés pendant plus de trois ans représentent 20 millions d’euros sans les intérêts. Aujourd’hui, la faillite des Forges n’est toujours pas clôturée.
Les travailleurs, après avoir subi la crise de la sidérurgie mondiale, ont subi le capitalisme d’État qui ne subventionne que le maintien d’une entreprise et non une nécessaire adaptation, à condition qu’elle liquide des outils et donc licencie des travailleurs. Dans la même veine, la politique néo-libérale européenne protège de fait le marché plutôt que les personnes. Les subventions doivent servir à une restructuration liquidant des outils de productions toujours utilisables mais plus assez rentables pour l’actionnariat privé.
Les Forges de Clabecq ne sont qu’un cas parmi tant d’autres d’entreprises subissant les fluctuations des données du marché mondial. Augmentation du prix de l’énergie, modifications de la demande, mise en concurrence globale, délocalisation de la production vers des pays où les travailleurs sont plus aisément exploitables. En parallèle, le dépassement général des limites planétaires se faisant chaque année un peu plus tôt impose, ou devrait imposer, une refonte totale de la dynamique de production et de la façon de l’aborder. Là où le bât blesse, c’est qu’il est impossible de penser une telle restructuration en laissant aux individus la charge de « se recaser ». Et ici apparaît dans sa splendeur l’essence inégalitaire du capitalisme : les propriétaires des moyens de production peuvent à loisir retirer leurs capitaux pour les replacer ailleurs, dans un espace fiscal plus avantageux, quand en tant que travailleurs, votre capital qui est votre force de travail ne peut être déplacé à loisir et recasé quelque part sur la planète où le droit du travail est plus confortable.
Alors, que faire ? Systémiquement, les dirigeants n’avaient qu’une option : réduire la masse salariale. De leur côté, les syndicalistes n’avaient qu’une issue : protéger les personnes composant ladite masse salariale. Les aides d’État étant conditionnées à la restructuration, l’adaptation de la production et de la taille de l’entreprise à la nouvelle demande n’était plus possible sans précariser un nombre important de travailleurs et travailleuses.
Des exemples de résistance au destin capitaliste existent, illustrant la transformation de l’outil de production en une unité plus adaptée à l’environnement direct et aux besoins locaux. Ainsi, à Florence, les travailleurs et travailleuses de l’usine de composants automobiles Driveline GKN se sont vu notifier leur licenciement par courriel du jour au lendemain sans autre motif que les velléités délocalisatrices de la firme propriétaire dues à une baisse des profits. Le jour même de la réception du courriel, les travailleurs et les travailleuses convergent vers l’usine et commencent à l’occuper. Après quelques mois, les travailleurs et travailleuses proposent une récupération de l’usine en autogestion par celles et ceux qui y travaillent pour y produire des vélos cargos, des panneaux photovoltaïques et des batteries sans extractivisme, soit sans lithium, sans silicium et sans cobalt. Ce plan de reprise, élaboré par un comité de solidarité technico-scientifique illustre la devise du mouvement : Insorgere per Convergere, Converge per Insorgere (s’insurger pour converger, converger pour s’insurger).
Les solutions existent et la réadaptation de l’appareil productif et des personnes le faisant tourner est primordiale dans l’optique d’une réelle rupture avec le système actuel.
Il y a aujourd’hui une volonté de revaloriser les zones industrielles en faisant une croix sur leur héritage chimique et toxique, et plus particulièrement les friches se trouvant à proximité de Bruxelles et le long du canal ABC (canal reliant Anvers à Charleroi en passant par Bruxelles, innervant largement l’appareil logistique belge et européen). Les déplacements de capitaux sur les friches industrielles en Wallonie sont accompagnés par un ensemble de dispositifs politiques (comme des partenariats publicprivé), scientifiques (via le Décret du Sol par exemple) et sociaux (grâce au Schéma de développement du territoire, ou SDT), qui rendent à la fois possible et acceptable la construction de logements de standing, de bases militaires ou d’entrepôts logistiques sur des sites irréversiblement pollués.
La réhabilitation des friches industrielles pose donc la question des raisons justifiant des opérations politiques, techniques et financières qui permettent de passer d’une zone de dépossession, contaminée aux métaux lourds et autres polluants, à une zone potentiellement rentable et livrée à la spéculation immobilière.
La lutte pour une transition socialement juste de l’appareil productif vers un modèle écologiquement soutenable ne fait que commencer. Le 10 juillet 2024, l’usine Audi de Forest annonçait un plan massif de restructuration menaçant 1 400 emplois (et peut-être près de 3 000 emplois à terme). Peut-être est-ce le moment de mettre à l’épreuve la méthode italienne de GKN, Insorgere per Convergere, Converge per Insorgere ! La transformation radicale du système productif étant au cœur de tout programme de « transition » écologique sérieux, la lutte pour la qualité de vie de celles et ceux qui y travaillent est primordiale au même titre que la lutte pour la qualité de vie des paysans et paysannes qui proposent une alternative au complexe agro-alimentaire.
La lutte pour une transition socialement juste de l’appareil productif vers un modèle écologiquement soutenable ne fait que commencer.
[1] F. THIRIONET et S. MARRA, Moi, Silvio de Clabecq, militant ouvrier, éd. Agone, 2020.