Le projet phare de la Région en matière de mobilité est un fiasco. Sur l’axe Albert-Nord, deux chantiers sur trois sont à l’arrêt, l’un depuis deux ans (Palais du Midi), l’autre depuis un an (gare du Nord). Quant à la deuxième phase (le tunnel vers Bordet et ses sept stations), pour laquelle Beliris ne dispose que d’une seule offre de prix, aucun permis n’a été délivré et aucun plan de financement n’a été élaboré. De manière générale, le coût annoncé du Métro 3 a presque quintuplé depuis 2009 et sa mise en service a été incessamment reportée – on parle aujourd’hui de 2034 voire 2038.
Face à cette gestion calamiteuse des travaux et à l’impact du projet sur les finances publiques, la classe politique bruxelloise se divise en deux camps. D’un côté, les partis qui continuent à soutenir le projet dans son entièreté. Le PS, par exemple, demande un cofinancement du fédéral tandis que Vooruit plaide pour un refinancement de la RBC. Le MR, quant à lui, promeut un partenariat public-privé tout en appelant à faire des économies pour poursuivre les investissements dans la mobilité [1].
Un autre camp, formé notamment par les partis écologistes, renvoie à la prochaine coalition régionale la décision de construire le tunnel vers Evere, sans toutefois remettre en cause les chantiers en cours. S’il semble prudent, ce positionnement esquisse néanmoins le scénario d’un demi-métro Albert-Nord aussi peu souhaitable que celui d’un métro Albert-Bordet.
Ne pas réaliser l’extension vers Bordet tout en poursuivant la « métroïfication » de l’axe Albert-Nord est en effet problématique, à plus d’un titre. Du point de vue de l’exploitant, d’abord : limiter la future ligne à la gare du Nord poserait des problèmes de remisage [2]. Du point de vue des usagers, ensuite : rejoindre le centreville depuis le nord ou le sud (avant Albert) impliquera au minimum une nouvelle correspondance. Enfin, ce demi-métro induit également la démolition du Palais du Midi.
Le gouvernement actuel a fait le choix de l’austérité pour financer sa fuite en avant.
Dépenser plus de 1 milliard d’euros pour un demi-métro ou presque 5 pour un métro largement inutile reposant sur une technique non éprouvée, c’est une alternative à laquelle IEB refuse de souscrire. D’autant plus qu’il existe des pistes pour améliorer la desserte du centre-ville et du nord-est, plus rapides et bien moins coûteuses que le Métro 3. L’une de ces pistes, c’est le Prémétro+ : une proposition pertinente, sobre et réaliste soutenue par une vingtaine d’associations dont IEB, l’Arau, le Bral et Save Tram 55. Le Prémétro+ prévoit l’injection d’une ligne supplémentaire dans le tunnel AlbertNord et l’amélioration de la ligne 55, autant de mesures qui pourraient rapidement répondre aux enjeux de capacité et de fréquence.
Mettre en œuvre le Prémétro+, c’est disposer de plusieurs longues lignes directement connectées aux espaces centraux. C’est assurer aux Schaerbeekois et Everois une ligne 55 plus capacitaire et plus fluide. C’est, enfin, permettre à la Région de financer d’autres politiques publiques, ses administrations et l’associatif bruxellois, alors que le gouvernement actuel a fait le choix de l’austérité pour financer sa fuite en avant [3]. Choisir c’est renoncer. Faire le choix d’un demi-métro, c’est avaliser la dégradation du réseau de transport public et entériner la démolition du Palais du Midi. Faire le choix du métro dans son ensemble entraînant au minimum les mêmes conséquences, l’alternative pertinente pour IEB est bien la suivante : Métro 3 ou Prémétro+ ?
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Il existe une alternative au Métro 3, à la fois réaliste, ambitieuse et immensément moins coûteuse. Elle s’appelle le Prémétro+, une proposition portée par la Plateforme Avanti regroupant une vingtaine d’associations.
[1] Ces positions ont été exprimées à l’occasion du débat organisé par le Bral au Muntpunt le 23 avril dernier.
[2] L’Écho, « Métro 3 : une demi-ligne AlbertNord pas viable à long terme, selon le CEO de la Stib », 30/05/23.
[3] BX1, « Le Parlement bruxellois valide les budgets 2024 de la Région et de la Cocom », 15/12/23.