Eh bien, il en a fallu du travail pour tenter de redresser un peu le Contrat de Quartier Marolles [1] que les différentes autorités en charge de la Ville se sont employées à dévier.
Si vous voulez être libres, il faut travailler.
Périclès
Pourtant au départ, le bureau d’études avait bien posé le diagnostic de la situation existante. Le dossier de base parle de « contrebalancer la pression immobilière et touristique », c’est dire… Même le ministre-président Rudi Vervoort et l’échevine Ans Persoons ont déclaré que le but était de « renforcer la position des Marolliens, […] de l’habitant de quartier précaire » et « contrebalancer la pression grandissante que le Sablon exerce sur le quartier, […] pression immobilière et touristique grandissante menaçant son identité et son accessibilité ».
Mais voilà, trois chefs de projet et quatre échevins plus tard [2], force est de constater les grands écarts entre ces intentions et les « fiches projets » soumises à l’enquête publique. Au point de se poser cette question : pourquoi avoir fait travailler pendant un an un bureau d’études, des habitants et des associations (en leur expliquant que le programme s’élaborait dans une logique « bottom up » : des citoyens vers les décideurs), si c’est pour qu’à la dernière minute des projets tombent du ciel tandis que d’autres projets importants disparaissent ou soient recalés en « opérations de réserve », ou encore soient détournés de leur philosophie initiale ?
Habitants et associations se sont démenés pour rectifier les mauvaises dispositions prises par la Ville, et ont bataillé ferme pour défendre leurs vues à la Commission de concertation. Son avis a retenu quelques-unes de leurs remarques.
Et si quelques unes de ces dernières ont été intégrées au projet présenté par le Collège de la Ville de Bruxelles à l’approbation des conseillers communaux, on reste loin des objectifs initialement annoncés.
La participation ? Il y a des échevins pour ça !
Il va sans dire que les gens non avertis, qui sont passés en curieux lors de l’une ou l’autre présentation organisée par la Ville, s’en sont allés au bout de vingt minutes et ne sont plus jamais revenus. C’est que les gens normaux comprennent vite qu’ils n’ont rien à gagner à participer à un jeu selon eux perdu d’avance.
On ne trompe pas facilement ces gens-là. N’ont plus participé aux Commissions de Quartier et aux Assemblées générales que les initiés et les pugnaces, appliquant la maxime de René Schoonbrodt : « Il faut savoir continuer rester durer. » Ceux-là se sont réunis, ont analysé, questionné, produit des centaines de pages de texte, publié avec des bouts de ficelle un vaillant petit journal bien fait Pavé dans les Marolles [3], et l’ont distribué gratuitement dans le quartier.
Qu’ils soient ici célébrés !
Il faut choisir, se reposer ou être libre.
Thucydide
[1] L’expression officielle est « Contrat de quartier durable ». Nous nous refusons à employer cette expression passe-partout, donc suspecte de green washing. TOUTES nos productions devraient être partout, tout le temps, durables. Mais le dire ne suffit pas. Faisons donc l’économie d’une étiquette trompeuse.
[2] Il ne faut jamais changer de cheval au milieu du gué, mais là, pendant l’année de mise en route, on a eu droit à de la haute voltige. Voir www.pave-marolles.be/y-a-t-il-un-pilote.