Inter-Environnement Bruxelles
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Expulsion violente au square de l’Aviation : consternation et incompréhension

Plusieurs associations et collectifs d’habitants bruxellois dont plusieurs sont situées à Anderlecht s’interrogent sur les pratiques répressives disproportionnées déployées lors de l’expulsion des 70 personnes sans papiers au square de l’Aviation à Anderlecht le vendredi 17 octobre dernier.

© Collectif Zone Neutre - 2025

Nous sommes des associations soutenant le collectif Zone Neutre. Ce dernier est à l’origine de l’occupation d’un bâtiment vide au square de l’Aviation à Anderlecht par 70 personnes sans papiers dont une quinzaine d’enfants. Cette occupation, qui a démarré au mois de mars de cette année, a fait l’objet d’une expulsion le vendredi 17 octobre à la demande du propriétaire du bâtiment, la Staring Real Estate, lequel envisage de construire un hôtel à cet endroit. Nous sommes consterné·es par la violence inouïe qui a déferlé ce jour-là sur les centaines de personnes qui s’étaient rassemblées pacifiquement en soutien au collectif.

Plusieurs d’entre nous sont des associations actives sur le territoire de la commune d’Anderlecht. Depuis l’installation du collectif en mars, nous avons vu positivement évoluer la vie autour de la place, où se croisent d’habitude avec froideur, voire inquiétude, les habitant·es, les personnes précaires et les touristes. Des liens se sont noués entre les habitant·es de l’occupation et les personnes fréquentant régulièrement la place ainsi que de nombreuses associations et collectifs locaux. Ces faits ont été reconnus à plusieurs reprises par le bourgmestre de la commune d’Anderlecht lors de différentes interpellations. Ce travail patient de tissage de liens sociaux a été anéanti brutalement le 17 octobre par l’intervention de plus d’une centaine de policiers armés d’auto-pompes, de matraques, de chiens et de lacrymogènes. Nombres de nos travailleurs et travailleuses présent·es le jour de l’expulsion se sont retrouvé·es en état de choc. Il s’agit d’un déni profond du travail que nous effectuons chaque jour aux côtés des habitant·es les plus vulnérabilisé·es de la commune d’Anderlecht et de la Région bruxelloise.
Des méthodes en question

Nous exigeons des explications sur l’usage démesuré de la force qui a été employée ce jour-là en faveur d’un investisseur privé dont le projet immobilier à cet endroit ne prendra pas forme avant des mois. Rien ne justifiait que des personnes aient été blessées, certaines même grièvement alors que le rassemblement était pacifique et que Zone Neutre a démultiplié les démarches de dialogue vers le propriétaire depuis plusieurs mois. Nous questionnons la violence, mais également le choix d’expulser 70 personnes, dont des enfants, à la veille de l’hiver et d’une audience devant traiter, le 3 novembre, de la légalité de la requête unilatérale d’expulsion. Nous questionnons une telle débauche de moyens financiers, alors que le collectif Zone Neutre est en passe de trouver une piste de relogement pour les 70 personnes et qu’il suffisait de patienter quelques semaines. Nous questionnons des méthodes profondément humiliantes et déshumanisantes qui consistent à faire évacuer les effets personnels des occupant·es en les balançant dans des camions poubelles alors que ceux-ci avaient identifié des lieux de stockage à proximité.

Nous voulons aujourd’hui comprendre comment un tel événement a pu se produire. En tant que secteur associatif, nous sommes profondément inquiets de la tournure autoritaire que prennent les « mesures » dites d’intérêt public, à tous les niveaux de pouvoir et de manière totalement décomplexée. Notre travail est déjà très lourdement impacté par le contexte de crise budgétaire et politique que connaît la Région bruxelloise. Nos équipes sont exsangues et les personnes que nous accompagnons encore plus. Notre travail de prévention n’est pas de la charité : il est indispensable pour garantir l’accès aux droits pour toutes et tous, la paix sociale et la sécurité dans nos quartiers.

Le 17 octobre, les autorités ont choisi de défendre le droit de propriété privée avant tout ; nous rappelons que le droit au logement est également constitutionnel et qu’il est du devoir des autorités de le mettre en œuvre, à travers des politiques et mesures légales telles la taxation des logements vides, la réquisition des bâtiments abandonnés, la mise en place de dispositifs d’accueil temporaire pour les personnes sans chez soi et sans papiers, la création de logements abordables de qualité pour toutes et tous. C’est par ce biais que nous combattrons l’insécurité d’existence et que la dignité humaine sera respectée.